Pour moi, faire partie de ce magnifique projet, c’est l’opportunité d’avoir une plateforme afin de partager mon histoire. Je sais que je ne suis pas la seule à avoir vécu des agressions à caractère sexuelles et j’espère pouvoir en inspirer d’autres à faire le travail afin de mieux vivre avec soi-même.
Le yoga, un des outils qui m’a gardé en vie durant la période la plus difficile de ma vie.
Cette histoire est la mienne. Que tu sois d’accord ou non, c’est ce que j’ai vécu et vis encore.
J’ai toujours cru qu’un choc post-traumatique (PTSD) était pour ceux qui étaient allés à la guerre. Je crois que c’est aussi pour ça que ça m’a pris du temps à comprendre et accepter que je vivais moi aussi avec les effets du PTSD. Au moment d’écrire ces lignes, je me sens vulnérable à l’avis du public puisque je suis encore malade. Selon mon médecin, je vivrai avec ces troubles pour le reste de ma vie. La différence, entre avoir une qualité de vie ou non, vient de moi et des efforts que je fais chaque jour, dès que je me lève.
Je vous mets en contexte…
J’ai toujours été une fille de party qui ne manquait jamais une occasion de virer. Dès l’âge de 14 ans, je buvais de l’alcool fort et j’oubliais mes soirées. Plus je me suis éloignée du nid familial, plus je buvais et plus les substances que je laissais entrer dans mon corps étaient toxiques. À travers ces soirées arrosées, on a abusé sexuellement de ma vulnérabilité.
J’ai vécu ces agressions dès l’entrée à l’adolescence, sans comprendre à ce moment que c’était bel et bien ce qui se passait. Au début de ma vingtaine, je suis tombée au plus creux de ma consommation d’alcool et de drogue. Je crois maintenant que j’essayais d’effacer ces images, de les plonger dans l’oubli, mais mon corps, lui, n’oubliait jamais.
J’avais 24 ans et j’étais barmaid dans un bar de Canmore en Alberta quand ma patronne de l’époque a sonné la première alarme de réveil. Elle m’a dit : “ I know you drink too much, I know you drug yourself, find yourself another passion than alcohol. I’ve seen too many people lose sight here and I don’t want to be invited to your funeral.”
C’est à ce moment que je me suis inscrite à ma formation de 200HRS elemental flow yoga teacher training au Guatemala. C’est aussi à ce moment que j’ai compris que j’avais des problèmes de consommation.
Au lendemain de ma fête de 26 ans, mon conjoint et moi, on s’est donné un défi de ne pas boire pour la semaine, puis le défi de la semaine a continué en un mois, puis jusqu’aux fêtes. Ces premiers six mois ont été les plus difficiles de ma vie. Je ne comprenais rien de ce qui se passait, je ne savais plus qui j’étais ni ce que j’aimais. J’avais l’impression de devoir tout oublier de mon passé, j’avais honte et je me sentais constamment coupable de tout. Je doutais de mes actions, de mes paroles et de mes pensées. Mon cerveau enregistrait du danger partout. Si j’attendais seule dans une voiture, je devais barrer les portes. Je pensais qu’on allait me kidnapper. Si quelqu’un me suivait un peu trop longtemps en voiture, mes mains devenaient moites, mon cœur battait à 100km/h et j’évitais d’aller directement à la maison à moins que la personne ne me suive plus. Lorsque mon chum quittait la maison pour aller travailler tôt le matin, il laissait les chiens dans la chambre avec moi. Parce que seule, j’avais trop peur. Finalement, les souvenirs enfouis ont refait surface. J’appelle ces souvenirs; le livre. Ce sont des flashbacks qui se présentent aussi rapidement que si une personne faisait virer les pages d’un livre en un rien de temps, mais puisque c’est ton histoire, tu sais exactement ce qui se trouve sur chaque page.
Un peu plus de deux ans plus tard, je n’ai toujours pas recommencé à boire et je vis toujours avec les mêmes symptômes. La différence, c’est les outils que j’ai acquis et le travail sans répit que je me dois de reconnaître. J’ai fait des efforts et personne ne pourra m’enlever ceci. En janvier 2021, ça faisait donc 6 mois que j’étais sobre, j’ai décidé de m’offrir de l’aide, j’ai fait appel au Calacs, centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel. Il y avait 10 mois d’attente. Entre-temps, j’ai eu les services d’une travailleuse sociale assez rapidement. Le simple fait de pouvoir parler à quelqu’un d’externe m’a beaucoup aidé. Le livre de Sonia Lupien “Par amour du stress” m’a été recommandé par ma travailleuse. J’y ai appris mes premiers outils pour revenir au moment présent, le seul moment qui existe réellement. J’ai appris à chanter lorsque ça ne va pas en voiture, je mets le son au fond et je chante à tue-tête. Comme Mme Lupien l’explique si bien, le fait de chanter nous invite à respirer par le ventre, ce qui calme assez rapidement le cerveau.
Lorsque j’ai terminé mes douze séances avec la travailleuse sociale, ma place n’était toujours pas disponible auprès du CALACS et j’avais toujours besoin d’aide. Pour ajouter à tout cela, j’ai découvert que j’avais un fibrome de la grosseur d’un pamplemousse dans mon utérus. On m’a donc prescrit un super médicament avec plein de beaux effets secondaires, le Lupron Dépot. En gros, ces effets ressemblaient à la ménopause et moi j’ai pogné le jackpot des effets secondaires. J’étais encore plus dépressive, sueurs nocturnes, chaleur, saute d’humeur, mal de cœur, et j’en passe. Les idées suicidaires sont revenues.
Je suis une battante, je suis résiliente.
Quelque chose en moi me disait de tenir bon, de continuer à chercher de l’aide. C’est là que j’ai trouvé l’aide d’une sexologue. Je n’avais pas vraiment les moyens de me payer ces services, mais c’était une question de vie ou de mort. J’ai aussi finalement accepté de prendre des anti-dépresseurs. Mon médecin me l’ a expliqué ainsi : “ Vois ces médicaments comme un outil. Tu fais une thérapie, c’est un outil, tu prends un médicament, c’est un outil, de la méditation, du yoga et de l’entraînement physique, c’est un outil. Mais si tu as de la difficulté à faire ton exercice physique parce que ton moral est trop à terre, comment veux-tu le remonter avec des exercices si tu n’es jamais capable de mettre en route cet outil ? “ Lorsque les médicaments ont fait effet, j’ai commencé à pratiquer le yoga chaque jour, ou presque. Avant ça, j’en avais toujours envie, mais je n’étais pas capable de me rendre à mon tapis.
Je suis Carolyne Collin. Ça fait un an que j’écris ce texte. Je me décide enfin à le rendre public puisque c’est en lisant les histoires d’autres femmes que j’ai décidé que moi aussi j’avais le droit de mieux vivre. J’ose espérer que mes mots sauront vous soutenir et vous motiver à demander de l’aide, à sortir de l’isolement.
Sachez que la pratique du yoga sur tapis n’est qu’une infime partie de ce qu’est le yoga. Ne vous en voulez pas trop si vous avez de la difficulté à dérouler votre tapis. Commencez par la pratique des 8 branches ici :
Article sur le 8 branches du yoga
Les ressources que nous allons vous énumérer sont des ressources que vous pouvez consulter lorsque vous avez besoin d’aide ou simplement, besoin de parler.
Liste des ressources :
Parlons suicide Canada (ligne 24/24) : 1.833.456.4566
Info aide violence sexuelle (ligne 24/24) : 1 888 933-9007
https://sosviolenceconjugale.ca/fr et ligne 24/24 : 1 800-363-9010
Info social 811
Le CLSC de votre région à fort probablement des ressources également pour vous.
CALACS: Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractères sexuelles
*Écrivez CALACS ou CAVAC dans google pour trouver celui de votre région
CAVAC : Centre d’aide aux victimes d’actes criminels
*Écrivez CALACS ou CAVAC dans google pour trouver celui de votre région
Carolyne Collins, Ambassadrice Proasana